dimanche 25 mai 2008

Réadaptation, fin de la première moitié

J’en suis maintenant à la moitié de ma session de réadaptation. Il fait beau, je suis dehors avec mon très cher MacBook Pro, assise juste devant le ruisseau. Les nénuphars sont arrivés. En avant, mon lilas survivant fait son possible. L’autre lilas, plus petit, a vu presque toutes ses branches écrasées sous le poids de la neige. Roger est en train de démolir l’ancien cabanon. Il ne cesse de travailler, c’est bien fatigant.

Ce matin, de la cuisine, j’ai entendu le signal de la laveuse qui venait de finir sa brassée. Je l’ai dit à Roger. Il a souri sans lever les yeux de son journal.

La réadaptation avance bien. Étant donné que j’ai la chance d’avoir ré-acquis le langage extrêmement rapidement, nous sommes maintenant passées aux applications pratiques.

Nous avons consacré une autre session aux appareils téléphoniques, cette fois en travaillant sur les différentes façons de les utiliser.

J’ai fait l’essai du branchement direct, un fil qui se place dans le téléphone et se branche directement dans le processeur, au moyen d’un coude spécial.

Roger fondait beaucoup d’espoir sur cet essai. Il en est effet convaincu que ma compréhension dépend de la qualité du son, or la qualité du son des téléphones amplifiés n’est pas des meilleures. Vous connaissez le son d’un système mains libres.

Déception : le branchement direct semble ne pas me convenir. La qualité du son était bien moins bonne que le son ordinaire entendu dans le récepteur ou même dans le haut-parleur mains libres. Plus de statique, plus de distorsion de la voix. Nous avons fait deux essais en branchement direct, un avec mon téléphone amplifié et un avec le modèle utilisé au Bouclier. Même résultat.

Mme H. dit que parmi les gens avec qui elle travaille, il y a une certaine proportion de gens que le branchement direct n’aide pas beaucoup et qui, comme moi, préfère utiliser leur appareil de la façon ordinaire.

Je me demande s’il est possible que ce soit une question de programme. Je compte demander à l’audiologiste de programmation, M. B., s’il est possible de faire des essais. J’ai rendez-vous avec lui vendredi prochain.

Excusez-moi, j’ai un meurtre à commettre.

(Paf !) Un maringouin de moins.

Ici, les maringouins sont sortis depuis peu, nous en sommes encore à la période où ils sont actifs toute la journée.

Le rendez-vous de programmation que j’ai est surtout destiné à voir si on peut atténuer l’effet d’écho (la double voix) simplement par la programmation. Dans certains cas, c’est possible. Dans d’autres, c’est seulement la patience et le temps qui arrangent les choses. Je me croise les doigts. Je ne suis pas impatiente de façon générale, tant s’en faut (vous me connaissez), mais je me rends compte que je suis, d’une certaine façon, impatiente question audition.

Mon problème, c’est que je ne m’étais pas assez renseignée sur le retour à l’audition avec un implant. En bref : normalement, c’est long. Très long. Par exemple, comprendre le langage prend généralement beaucoup, beaucoup plus de temps que ce que j’ai connu.

J’étais consciente de ma chance en ce qui concerne le langage, après tout mes « scores » aux tests étaient assez éloquents.

De façon contradictoire, c’est justement ce qui m’inquiétait. Il me semblait que mon audition musicale tirait lamentablement de l’arrière par rapport à ma compréhension du langage et je craignais que ce soit dû à des causes essentielles, par exemple mon otosclérose. J’ai bien lu qu’il y a des gens qui ne regagnent jamais tout à fait la capacité d’écouter de la musique.

J’avoue qu’hier, j’ai fait une sévère attaque de bleus. Du bleu foncé.

D’abord, il y a une dizaine de jours, j’ai participé à un atelier d’écriture de chansons. J’avais déjà travaillé avec ce même animateur qui dirige ces ateliers dans des conditions qui étaient auparavant pour moi désastreuses : une ancienne salle de classe, très grande, avec de la réverbération à n’en plus finir.

Les ateliers précédents, j’avais peine à comprendre le tiers de ce qu’il disait. Cette fois-ci, dans les mêmes conditions, j’ai à peu près tout compris.

(Sauf les exemples de musique.)

Marc nous a donné du temps pour écrire pendant l’atelier lui-même. J’ai donc commencé une chanson, que j’ai terminée quelques jours après. Je l’ai transcrite avec mon logiciel d’impression musicale.

C’est avec Band-in-a-Box, le logiciel d’orchestration, que les choses se sont gâtées. À toute fin pratique, je ne suis pas capable d’entendre ce que je compose.

Je fais aussi actuellement l’essai d’un logiciel de synthèse vocale. Bon, d’accord, à 40 €, il n’y a pas de miracles à attendre. N’empêche que je ne discerne pas correctement les sons produits par l’affreuse petite voix. Et ce n’est pas elle qui fait erreur, je l’ai fait valider par Roger.

Excusez-moi. (Paf !)

Ensuite, hier, j’ai joué du piano plus d’une heure, avec le programme de vie courante et aussi avec le programme musique externe (par opposition à musique iPod). J’ai fait des essais avec la commande de volume. Je voulais essayer de rendre le son plus précis, plus net. Comme ce sont les harmoniques en fréquences aiguës qui sont à l’origine de la distorsion très marquée que je perçois, j’ai essayé de jouer à faible volume. Les résultats étaient moins que concluants.

Donc, hier soir, j’avais les bleus. Je suis donc allée voir sur Internet pour trouver d’autres expériences. En début de soirée, j’ai écrit un message dans le forum des utilisateurs de la société qui a fabriqué mon implant (Advanced Bionics).

Pas plus tard que ce matin, j’avais quatre réponses ! Qui toutes disaient la même chose, en gros. La distorsion que je perçois, les désagréables résonances aberrantes, mes quatre correspondantes les avaient vécues. Il faut y mettre le temps et il faut s’exercer, comme pour la réadaptation.

Parmi les conseils pratiques qu’on m’a donnés :
• un surtout que j’avais plus ou moins instinctivement trouvé par moi-même : écouter des choses simples et familières ;
• mais on m’a aussi dit d’écouter de façon régulière, ce que je ne faisais pas, me disant que ça ne me servait rien à rien de me foutre les bleus et que je ferais mieux de laisser le temps faire son œuvre ;
• on m’a aussi conseillé de tenir un journal d’écoute, pour mieux analyser mes essais ;
• deux correspondantes écoutent leur iPod avec leur programme ordinaire et des écouteurs placés près de leur processeur ; je compte bien faire cet essai ;
• aussi, écouter le plus possible avec la musique ou les mots des chansons sous les yeux, pour la rééducation de mon cerveau.

Patience. L’une des correspondantes mentionnait l’expérience d’une audiologiste implantée, qui a dû attendre six mois avant que le son du piano redevienne un son de piano.

Au moins, moi, presque tout de suite après l’activation de mon implant, le piano sonnait à peu près comme un piano. Un piano chaudron, avec quelques notes fausses (le sol 5 sonne encore comme un la 5) et plein de résonances aberrantes… oui, mais un piano. Mon audition musicale n'est donc pas vraiment si « en retard ».

Patience.

2 commentaires:

Suzanne a dit…

Oui patience et courage, valent mieux que force et rage... bon je te souhaite quand même cette évolution si attendue et je persiste à croire que tu y arriveras , tu es trop tenace pour ne pas atteindre ton but.

chakib a dit…

Bonsoir Hélène,

Pour la musique ça peut venir par a-coups...comme des plateaux ...enfin c'est mon expérience, il faut que tu sois patiente et le déclic viendra Inchallah...Pour moi ça m'a pris un certain temps pour apprivoiser les notes aigus. Piaf par exemple c'était vraiment inintelligible au début puis c'est venu.