samedi 26 avril 2008

Début

Je suis allée magasiner hier et aujourd’hui. Je n’ai pas dit une seule fois « je suis sourde, il faut que je vous voie pour vous comprendre ». Aujourd’hui, j’ai dit une fois « Je n’ai pas compris. ».

Il reste un tas de neige en arrière. Le gazon est vert (mais clairsemé) en avant. Cet après-midi, je me suis assise sur ma balançoire pour lire en buvant un verre de vin blanc.

jeudi 24 avril 2008

De vrais amis

Je tiens beaucoup à remercier « publiquement » et hautement Suzanne et Roger, chez qui nous avons logé ces deux dernières semaines.

Leur accueil chaleureux, leur gentillesse de tous les instants, leur intérêt sincère à ce qui m’arrivait, les petits soins dont ils m’ont entourée, tout ça a adouci une expérience fascinante, certes, mais difficile.

Il n’aurait pas été aussi facile de faire mes expériences sonores dans une chambre d’hôtel et la programmation aurait peut-être été plus longue.

Suzanne, Roger, je vous embrasse encore.

Elles sont toutes là !

Elles sont toutes là ! J’ai pris mon courage à deux mains et, sans même me mettre en programme musique, je me suis assise au piano et j’ai joué chacune des touches blanches, de haut en bas et de bas en haut en commençant par le do du milieu.

Elles sont toutes là, et presque toutes à leur fréquence. Elles sont souvent un peu dédoublées, encore un peu métalliques mais elles sont là.

Dans la littérature, il est rapporté que l’implant cochléaire ne permet parfois pas de discerner la différence entre deux sons (lequel est le plus haut) à moins d’un écart de quatre ou six tons ou même plus. Pour moi, ça, ç’aurait été vraiment souffrant.

Mais elles sont là. Et puisque la semaine dernière, certaines d’entre elles s'accompagnaient d’un bong à peu près indescriptible (de fréquence et d'intensité variables, en forme de s, d’une durée d’environ une seconde) et que ce bong s’est entièrement évaporé (bon débarras, ne reviens pas, merci), je me dis que c’est comme l’hiver : on s’en va du bon côté.

mercredi 23 avril 2008

Programmation, jour 8

C’est fini. Over. È finita la commedia.

La programmation s’est terminée ce matin. Nous avons choisi, pour la vie courante, le programme « gagnant », calculé et dessiné au mieux par Mme L., avec l’utilisation des deux micros (externe et interne) dans une proportion de 50-50. Ce programme pourra me servir pour le téléphone.

J’aurai aussi deux programmes de musique, l’un plus particulièrement pour l’écoute de type iPod, l’autre, pour l’écoute de type haut-parleurs externes ou pour jouer du piano ou du clavier. Le programme du piano pourrait aussi servir pour le téléphone mais les bruits de fond de la ligne seraient alors plus présents.

Rien de tout cela n’est coulé dans le béton. Tout pourra se changer si la réadaptation, ou tout simplement l’usage, en font apparaître la nécessité.

Je prends une journée de congé et n’écrirai pas beaucoup plus longuement aujourd’hui.

Encore une fois merci à vous qui m’avez exprimé votre soutien, en commentaire ou en privé. Il m’a fait grandement plaisir de vous lire.

J’en reparlerai certainement encore et encore, mais il ne vous surprendra pas d’apprendre qu’en sortant du bureau de Mme L. pour la dernière fois, je me suis précipitée vers la boutique de l’hôpital pour lui acheter des fleurs.

Mme L. et Mme T. m'ont accompagnée, chacune à leur façon, tout au long d’un processus difficile. Elles l’ont fait avec une compétence évidente, une patience infinie pour donner toutes les explications requises, et un respect inconditionnel de mes requêtes.

J’ai appris moi-même tout récemment que le programme d’implant cochléaire du Québec constitue l’un des programmes les plus importants au monde. En choisissant de le concentrer au CHUQ, on a permis le développement d’une équipe de premier ordre, autour du Dr Ferron, une sommité dans le domaine scientifique et un homme admiré et révéré de son équipe et de ses patients. Avoir la chance de recevoir un implant cochléaire au Québec, c’est vraiment partir avec une longueur d’avance.

Nous rentrons à Sainte-Sophie demain. Nous espérons que notre ruisseau aura été sage en notre absence. À demain, donc, ou peut-être à vendredi.

mardi 22 avril 2008

Programmation, jour 7

L’a-t-il fait ?




L’a-t-il fait ?



Voilà, c'est fait. Avec mon amour, chose promise, chose due.




Aujourd'hui

Des tests, des tests, des tests.

Programmer le processeur pour mon iPod. Essais faits avec une de mes chansons, parce que mes mixages sont « plats ». La voix est donc bien distincte du fond. Entendre la voix d’Élisabeth avec, cette fois, les fréquences supérieures à 1000 Hz, que je n’entendais plus.

Pas facile, programmer la musique. Personne ne peut m’aider : je suis la seule à entendre mon iPod.

Discussion au sujet du programme qui a « gagné » hier après-midi. Au souper d’hier soir, nous étions huit et j’ai pu suivre les conversations beaucoup mieux. Je trouvais pourtant les bruits mats. Mme L. a fait un changement, puis, à ma demande, un autre, ce matin. Le deuxième était de trop. Et comme j’étais fort surprise que le programme que je m’attendais à préférer avait en fait fini dernier, Mme L. me l’a remis, pour en faire vraiment un autree essai avant de décider de l’abandonner.

J’apprécie énormément à quel point toute l’équipe respecte mes besoins et mes opinions.

Nous faisons aussi des essais de téléphone. J’y reviendrai. Carl (en commentaire) a raison : c’est un travail de titan.

Comme l’a dit Jean-François, pas facile de redonner l’ouïe à une sourde. Plus facile de redonner la vue à un lépreux ou de multiplier les poissons en marchant sur les pains, ou de lui jeter la première brioche aux bleuets, à ce judas lisse-carotte.

Il avait pas pris ses petites pilules vertes quand il a écrit ça. Ou peut-être justement les avait-il prises…

En après-midi, nouvelle série de tests avec Mme T. Elle me prévient qu’elle a mis la barre haute, compte tenu des résultats d'hier. (Élisabeth a dit : « ma mère pète des scores jusque dans ses électrodes ! »). Mme T., elle, a dit qu'il fallait faire redescendre Mme L., qui flottait sur les nuages, hier.

Test de mots sans contexte, d'une ou deux syllabes, et test sur une seule syllabe (té, vé, mai, geai, etc.) avec le programme « gagnant » et le programme « perdant ». Les résultats bruts confirment l’avance du programme « gagnant ». Les scores sont bons, moins que ceux d'hier, mais quand même très bons pour neuf jours de port.

J’ai fait mes devoirs. Je devais, selon Mme T., appeler ma fille, la même qu’hier, a-t-elle pris la peine de préciser. Ce ne sera pas difficile, j’ai dit.

J'ai aussi appelé Jean-François. Qui n’était pas là, mais j’ai bien entendu son laconique « Laissez un message. » Alors l’appel sans message, Fils, c’était moi.

Je tombe de fatigue sur le titan, pardon, sur le divan — pas pu résister, c’est atrocement mauvais et en plus, je ne suis même pas assise sur un divan. Je n’ai pratiquement pas dormi la nuit dernière, ça se voit, non ?

lundi 21 avril 2008

Des gens formidables

Ce n’est pas fini et j’aurai sûrement l’occasion de revenir sur ce sujet, mais je sens la profonde obligation de remercier ce soir le Dr Ferron et toute l’équipe opératoire et Mme L. Ils ont toute mon admiration et toute ma gratitude.

Programmation, Jour 6

Juste un mot parce que j’ai eu des tests ce matin et cet après-midi et que ce fut très exigeant.

Mais aussi trrrrrrrrès gratifiant. En deux mots : en novembre, j’ai passé le test qu’ils appellent Multimédia : 20 phrases prononcées par des voix réelles d’enfant, de femme ou d’homme. J’entends chaque phrase une fois, je dois la répéter, ou en répéter ce que j’en ai entendu. L’ordinateur ne répète pas. Des phrases courtes, du genre :
— J’ai mangé du gâteau au chocolat au souper.
— Les chiens sont dans le parc.
— As-tu vu mon chapeau ? (qui m’a fait pouffer parce qu’elle était dite par une voix d’homme comme Roger demandant « as-tu vu mes lunettes ? »

En novembre, avec mes deux prothèses auditives réglées au niveau optimal, j’ai eu 25 %.

On m’a fait passer ce même test trois fois cet après-midi (avec des phrases différentes, bien entendu). Trois fois, c’est-à-dire une fois par programme, étant donné qu’il s’agissait de déterminer quel programme était le plus avantageux pour moi.

Mme L. m’avait prévenue : madame Dion, n’oubliez pas que ça fait seulement une semaine que vous avez votre implant. Des scores de 30 %, 45 %, inquiétez-vous pas avec ça. (Oui, elle avait lu mon message du bleu pays, car un peu avant elle avait mentionné avoir lu mon blogue.)

J’ai eu (j’ai oublié les chiffres exacts) quelque chose comme 74 % avec mon moins bon programme, 82 % avec mon deuxième programme et plus de 90 % avec mon meilleur programme.

Est-ce que je suis contente ? METTEZ-EN !!!!!!

Au souper, Roger a raconté que, pendant que je me reposais un peu en haut, il avait reçu un appel de Mme L. Elle avait reçu le rapport de l’audiologiste, Mme T., et avait tenu à nous appeler pour nous dire que j’avais obtenu les scores les plus hauts jamais observés après une semaine avec l’implant.

Si j’en crois Roger, elle lui aurait annoncé que, selon elle, c’était un WOW qui allait l’obliger à se couper la barbe.

Mais je dois vous dire que Roger m’aide tellement, il travaille si fort, avec Mme L., avec moi entre les rendez-vous, je ne suis pas certaine où j'en serais sans son apport. Je lui ai dit que je le dégageais de sa promesse.

Fin de semaine - congé

Congé ? Oubliez ça ! Ce serait trop long tout vous raconter, je me reprendrai un peu plus tard. Mais congé ce ne fut pas. Quelques indices :

— Mac Pro, Airport
— pompe submersible (3 fois mon Père)
— service d'urgence de Sainte-Sophie

dimanche 20 avril 2008

Programmation, jour 5 (écrit dimanche)

Programmation, jour 5 (écrit dimanche)

Rassurez-vous, je suis revenue du bleu pays qui était le mien en soirée, jeudi. Roger m’a mis un des programmes préférables (lui, il sait) et augmenté le volume, si bien que j’ai vu que la confusion n’était pas irrémédiable.

Je reviens à jeudi matin pour rire un peu. Au déjeuner, j’ai fait l’essai de changer de programme pendant le repas pour pouvoir faire une comparaison plus juste. Le programme essayé me semblait fort différent au niveau des bruits.

Je mange une autre délicieuse spécialité de RogerL, une crêpe aux fruits, et les bruits de mastication sont vraiment très présents. Rappel du céleri… la veille ? l’avant-veille ? (En lisant ma demande de choses molles, Roger m’avait menacée de me préparer du gruau. Pas grave, je lui ai dit, j’aime ça.)

Bon, alors revenons au déjeuner. J’écoute attentivement. J’annonce :
— Le bruit de la fraise n’est pas le même que le bruit de la banane.

Tout le monde s’esclaffe et Dominique, le fils de Suzanne, me montre le contenant qu’il tient et me demande :
— Et le bruit de la mélasse ?

Revenons à vendredi. Le matin, à la cafétéria de l’hôpital, j’étais beaucoup plus en confiance que jeudi soir. J’ai entendu deux clientes parler derrière moi. J’ai pu parler avec Roger dans ce qui un endroit fort public, même s’il était assez tôt et qu’il n’y avait pas énormément de gens.

À la rencontre avec Mme L., elle m’annonce qu’elle va me faire passer un audiogramme pour mesurer les seuils d’audition avec le processeur et l’implant.

C’est un des audiogrammes les plus difficiles que j’aie passés de toute ma vie. Elle va directement à la mesure critique, diminue l’intensité du son jusqu’à atteindre le seuil où j’entends encore, va encore plus bas et remonte, en va-et-vient pour s’assurer que je ne donne pas de faux positifs. Et en contre-vérification, elle ne teste pas les électrodes uniquement dans l’ordre.

Comme j’ai à peu près en permanence des acouphènes ténus en arrière-plan, quand elle teste un nouvel électrode dans les sons très aigus en envoyant une impulsion très près du seuil, je ne suis pas sûre si ce que j’entends est « son » son ou un des « miens ».

Finalement, le test montre que je suis maintenant à un seuil de 25 décibels partout, de 125 à 8000 Hz, avec une petite pointe de 20 décibels à 1000 Hz (je crois). Auparavant, j’étais, au mieux, à 80 décibels et à partir de 1000 Hz, l’on ne pouvait pas savoir parce que l’intensité que j’aurais peut-être pu entendre était destructive.

C'est donc un signe tangible de l’amélioration de l’audition brute.

Reste à amener l’audition perçue à la hauteur.

Mme L. me remet ensuite la trousse des accessoires. Nous rions au sujet des accents de couleur. Elle m’explique que cet accessoire aide énormément les enfants à accepter de porter leur appareil. Il paraît que les filles choisissent la couleur du jour avec beaucoup de soin. J’en ai… trois. Déception profonde.

Parmi les autre accessoires :
• un étui servant à recevoir le processeur et l’antenne tout une nuit au moins une fois par semaine pour en retirer l’humidité. Ça fonctionne à partir de cristaux de silice ;
• un crochet à microphone simple ; je porte actuellement le crochet à microphone ordinaire et à microphone pour téléphone ; c’est le choix d’à peu près tout le monde parce que ça permet de répondre au téléphone directement ;
• une jonction servant d’entrée pour tout ce qui est appareil audio à pile, notamment un iPod ; on ne recommande pas de s’en servir pour un appareil relié à l’alimentation électrique, parce que le processeur n’est pas protégé contre les sautes de puissance ;
• j’ai déjà reçu le chargeur, les 4 piles et l’étui.

Mme L. reprogramme le processeur en fonction de l’audiogramme. Et voilà qu’une fois de plus, tout s’arrête. Cette fois, elle part me chercher un processeur de rechange. Elle nous demande de continuer avec le processeur actuel mais, la prochaine fois que le son « coupera », je devrai changer de processeur.

Je signe le contrat d’engagement. Tout ce qui est externe demeure la propriété de l’hôpital, qui l’assure. Passé la période de garantie de 3 ans, un bris est assuré avec franchise de 1500 $ (mon assurance peut prendre la relève, la prime dépend des assureurs). Droit de perdre le processeur une fois pendant la période de garantie. Un bris dû à la négligence est à la charge de l’implanté. Je me fais expliquer « négligence », étant donné que ce n'est pas très rassurant. Elle dit que Advanced Bionics est très indulgent. Il n’y a eu que deux cas de réparations à la charge de la personne elle-même depuis le début du programme.

Et voilà, la première semaine de programmation est finie.

jeudi 17 avril 2008

Programmation, jour 4

À vous dire franchement, je trouve la vie dure.

Hier et aujourd’hui, j’ai dûment pris des notes. Je vous en fais grâce, c’est à n’y rien comprendre. La méthode purement expérimentale, par tâtonnements, me réussit mal dans tous les domaines. Le programme 2, disons, est tour à tour pas si mal ou pourri. Et les autres de même. Je vois bien qu’il n’y a pas vraiment d’autre méthode – ou alors comme aux États-Unis, une demi-journée de programmation, ensuite, arrange-toi, bonjour, on se revoit dans six semaines.

Il m’est apparu aujourd'hui un problème de voix. J’en ai deux. Une en dedans et une en dehors. Et elles ne coïncident pas.

Encore aujourd’hui, il y a eu une perte de son. Roger a changé l’antenne. Il s’en suivi une sombre histoire d’aimant perdu. Et, finalement, retrouvé.

Je ne suis pas découragée, je sais que tout ça est nécessaire. Ça ne rend pas les choses plus faciles.

Et en plus, le port du processeur me fait mal à l'oreille. Avez-vous déjà eu une ampoule dans le creux entre l’oreille et le crâne ?

Il y a quand même mes cheveux qui sont contents. Cinq semaines de shampoing à la betadyne, ça vous fait le super voyage de foin. Quand j’ai utilisé le shampoing que Suzanne met à la disposition de ses hôtes – tout est toujours de la meilleure qualité chez Suzanne et Roger –, j'avais l’impression d’entendre mes cheveux boire le revitalisant à grosses gorgées.

Rencontre demain matin et ensuite on rentre pour la fin de semaine. Pas congé, loin de là. Il n’est pas question de revenir à l’appareil auditif pour tout perdre les progrès déjà acquis.

Demain, je vais demander à Mme L. comment s’évalue mon évolution.

Ce soir, valises, etc.

Répétons-nous : demain est un autre jour.

Merci, Carl

Carl m'indique que le test de biométrie en vue d'une opération pour une cataracte (une catarectomie ? une cataractectomie ?) se fait par imagerie par ultrasons et donc ne présente pas de problème en cas de port d'un implant cochléaire. Ouf ! échanger la surdité pour la perte de vision… pas exactement l'affaire du siècle.

mercredi 16 avril 2008

Programmation, jour 3

J’ai eu quelques frissons, aujourd’hui. Par deux fois, à la cafétéria de l’hôpital, où nous déjeunons Roger et moi quand nous partons à l’heure, le processeur s’est brutalement arrêté. Silence absolu. La première fois, j’ai pensé que, distraitement, j’avais déplacé l’antenne (il faut faire attention quand on se gratte la tête ou quand on se recoiffe). J’ai tout enlevé, je l’ai remis, tout fonctionnait à nouveau. La deuxième fois, j’étais bien certaine que je n’avais fait aucun mouvement, ni des mains ni de la tête. J’ai expliqué le phénomène à Roger. À nouveau on enlève tout. Roger a inspecté tous les contacts, enlevé et replacé la pile, me l’a replacé lui-même de ses blanches mains. Nous en avons parlé à Carole L., qui l’a à son tour inspecté. Et ça s’est reproduit une troisième fois un peu plus tard devant elle. Elle a remis à Roger une autre antenne, avec des instructions.

Je ne peux pas dire que les mots « bris interne » m’enchantent particulièrement. Tségenrestylecomme.

J’étais un peu embarrassée ce matin, avant mon rendez-vous. Hier, je n’ai pas été une très bonne expérimentatrice. Comme je vous l’ai dit, je me suis mêlée dans les programmes. Je n’avais guère de commentaires pertinents à faire ce matin, si l’on excepte que j’avais trouvé que le programme 2 était un peu moins intéressant, un peu trop sourd.

Elle nous a montré à quel programme elle avait assigné quelle programmation. Pour le moment, il semble que je favorise les programmes de type Fidelity, ceux avec les canaux virtuels. Elle nous a bien expliqué que cela peut encore changer. C’est un fait que plus de gens favorisent ces programmes mais les mesures de rendements ne montrent pas d’avantage particulier, c’est vraiment une question de physiologie et d’habitudes individuelles.

Je n’ai pas eu grand chose à faire, ce matin. Mme L. a mesuré le fonctionnement de chaque électrode, la réponse à la puissance. De nouveau reliée à son ordinateur, j’entendais une série de petits bruits. Selon l’électrode, cela allait de la mitraillette puissante (mais lente) à une mitraillette un peu plus légère, puis à une machine à écrire, puis une goutte d’eau, puis… je n’ai pas trouvé de descriptif pour les très aigus cliquetis des derniers électrodes.

J’ai appris que tous mes électrodes étaient fonctionnels et répondaient parfaitement. Vous me direz que c’est ce qu’on nous avait annoncé au moment de l’opération. Je ne sais pas très bien la différence. Mme L. nous a expliqué que la pose des électrodes est une affaire fort délicate. Le chirurgien doit répartir les 16 électrodes correctement dans la cochlée. Je ne sais pas si on parle de répartition selon la distance ou les fréquences captées ou autre chose. Or toutes les cochlées ne sont pas identiques, tant s’en faut. Il y en a des petites, des grandes, des plus tordues, des déformées… La mienne était sclérosée, ce qui peut rendre les choses difficiles. Récemment, une implantation a demandé cinq heures et demie à cause de la difficulté à poser les électrodes. Dans mon cas, ma cochlée s’est montrée pleine de bonne volonté et la pose a été très facile. Carole. L. a dit que j’avais été « un beau cas ». On prend sa fierté où on peut.

J’ai mentionné à Mme L. que je ressentais une légère douleur au crâne, non loin de l’endroit où l’antenne extérieure se colle, ce que je suppose être l’endroit de l’autre partie interne. Normal, a-t-elle dit. Les éléments se déplacent un peu, notamment suivant la position de la tête la nuit. Ce soir, je ressens aussi une légère douleur le long de la cicatrice. Je préférerai peut-être porter les piles de moins longue durée, au début. Elles sont moins longues et moins lourdes.

J’ai oublié d’écrire, hier, que j’avais entendu de la musique, hier, dans l’auto. Roger a branché son iPod et j’ai assez clairement entendu la mélodie d’une pièce que je connais bien. La mélodie est très isolée, une seule guitare jouant une phrase, le reste du groupe jouant un accompagnement très doux (accompagnement que je ne distinguais pas, en revanche). Si Élisabeth reconnaît et identifie la pièce, nous trouverons un lien pour pouvoir la faire entendre. Élisabeth ?



J’ai fredonné. Roger s’est tourné vers moi et a demandé, d’un air incrédule : « tu entends ça ? »

Aujourd’hui, il m’a dit qu’à ce moment-là, pour la première fois depuis des années, j’avais chanté juste.

Franchement, si ce n’est pas un WOW, ça, je ne sais pas ce que c’est. Non ?

En revenant, ce matin, j’ai mis une Gymnopédie, de Satie. Après tout, plus simple que ça, ça ne se peut pas. Là encore, j’ai entendu et reconnu la mélodie de main droite, mais pas la main gauche. Tantôt, Suzanne a mis un CD de Céline Dion. J’entends la voix et la mélodie mais je ne distingue pas parce que je ne connais pas.

Étant donné que j’ai jusqu’à vendredi pour faire mes observations sur les programmes, j’ai gardé le même programme plus longtemps.

J’ai commencé par le programme 1. Pas vraiment grand chose à signaler. Les bruits acquièrent tranquillement plus de définition. La voix de Roger, toujours mon point de référence, est un peu déformée. Je la comprends assez bien. Je participe à une conversation avec Suzanne, qui est à contre-jour, je comprends assez bien. Ça pourrait être mieux.

Pendant le souper, la salade croquante faite par RogerL me nuit à grandement ! Le bruit du céleri défie l’imagination. Des choses molles, demain, RogerL, svp !

Suivre la conversation au souper est quand même un peu plus facile qu’hier soir. Je suis aussi nettement moins fatiguée.

Je passe au programme 2 pendant le souper, pour avoir un meilleur point de comparaison. Les sons deviennent immédiatement plus métalliques mais je comprends un peu mieux les gens. Je gagerais bien que c’est un programme à canaux virtuels. Roger le sait mais je ne le lui demanderai pas. Je suis l’incarnation même de la vertu.

En vrac.

Dans les aéroports, pour passer à la sécurité, je devrai présenter ma carte de porteuse d’implant. Je provoquerai très probablement une alarme en passant dans le portique d’inspection. Je ne dois pas retirer le processeur et le faire passer au détecteur sous peine de me retrouver avec un processeur entièrement déprogrammé. C’est arrivé à une porteuse qui s’en allait en vacances. Charmant !

Je voulais vous proposer de la documentation sur l’implant. Malheureusement, le site français d’Advanced Bionics, sous l’Auria Harmony, ne parle que du système HiRes et non du système Fidelity. Pas encore approuvé pour la vente en Europe ? Site non mis à jour ? Je ne sais pas. Il y a quand même des choses intéressantes.

http://www.bionicear-europe.com/fr/products/produits.html

Si vous préférez le site anglais, le voici.

http://www.bionicear.com/For_Professionals/Technical_Product_Details/Auria_Harmony_BTE_Sound_Processor.cfm?langid=1

Et pour finir, deux délicieuses blagues. Il est écrit en toutes lettres dans le manuel d’utilisation du processeur qu’il faut éviter de le faire fonctionner aux températures extrêmes. Par exemple à température inférieure à 32 °F. Je vous jure ! Je vais tout innocemment poser la question à Mme L. Je ne pourrai pas me servir de mon processeur à peu près de novembre à mars ? Vraiment ?

La deuxième. Si vous regardez les sites que je vous ai indiqués, vous apprendrez que le petit couvercle de l’antenne extérieure et celui du processeur même (que je n’ai pas encore vu) se font en 20 couleurs. Me voilà vraiment mais vraiment ravie. On voit des ensembles orange, turquoise, violet. Houlalalala !

La fatigue monte et les sons s’en vont. Moi aussi. À demain.

mardi 15 avril 2008

Programmation, jour 2

Pas ma meilleure journée.

Ce matin, nous avons repris le travail sur les électrodes, un par un. Il s’agissait pour moi d’écouter des bips jusqu'à ce qu’ils atteignent le niveau « fort et confortable ». Il fallait aussi que je maintienne le même niveau de confort pour tous les bips. Pas facile. Je suis sortie de la rencontre un peu étourdie.

J’en ai discuté avec Roger ce soir. Je lui disais que j’avais suivi ce que je croyais être les indications de Carole L, à savoir arrêter un peu en deça (elle m’indiquait que je devais rechercher le niveau 6 sur une échelle de 1 à 10, 10 étant fort et inconfortable). D’après mes explications concernant comment j’en arrivais à mon appréciation de la force des bips, il croit que j’aurais pu aller plus haut. Je crois que nous devrons en reparler avec Carole L. demain.

Je dois faire rapport de mon expérience, à nouveau trois programmes. Je me suis mêlée, je crois. Certaines impressions que je croyais avoir du programme 2 se rapporteraient en fait au programme 3. Peut-être. Ou l’inverse.

En passant, ce matin aussi, j’ai fait rapport de mon expérience d’hier et j'ai parlé de mon blogue. J’ai dit à Mme L. que j’avais parlé de son « arrette ». Elle a ouvert son propre cahier de notes et a lu sa propre observation à ce sujet, que j'avais entenddu « arrette »

Actuellement, je suis en programme 3, ce que je pense être le programme que je préfère aujourd’hui. (Mme L. ne me dit pas quel programme est assigné aux positions 1, 2 et 3 du processeur.) J'ai monté le son un peu. Mme L. a dit : « ne venez pas me dire, c'est pas mal mais c'est pas assez fort… montez le son ! » Vers la fin du souper, j'arrivais à comprendre assez bien. Il est maintenant près de 20 h et les sons sont en train de perdre tout leur sens. Métal, métal, heavy métal.

Il faut dire que je me suis éveillée ce matin un peu avant quatre heures et que je ne me suis pas rendormie.

Bon, demain est un autre jour.

En passant

Si vous avez l'esprit scientifique et comprenez bien l'anglais, je vous recommande cet article, que je viens moi-même tout juste de découvrir.

http://www.hearingresearch.org/Dr.Ross/CI-one.htm

L'auteur est un médecin qui a reçu un implant. Dans cette première partie, il explique de façon approfondie le processus de programmation que je vis cette semaine et qui se continuera la semaine prochaine. L'article met bien en lumière le travail exigé de l'audiologiste, l'importance de la compétence et, on peut dire, de l'art de la programmation. Chapeau, Mme L. !!!

lundi 14 avril 2008

Jour J2 - ÇA Y EST

Alors, qu’a-t-il dit ?

Franchement, je n’en sais trop rien.

Parce que ça ne s’est pas passé tout à fait comme je m’y attendais.

Carole L. a commencé par parler de l’horaire de la semaine (elle a une journée d’étude jeudi, donc j’ai une journée de congé) et m’a ensuite donné des éclaircissements sur les tests que je peux ou ne peux pas passer et aussi – et surtout – sur ce qui peut se faire quand on a vraiment besoin d’un test non recommandé. J’aurai une carte, avec les précautions à prendre et un numéro de référence où un chirurgien pourra être rejoint pour autoriser ou déconseiller une procédure, ou encore indiquer les mesures à prendre. Question biométrieje devrai m'informer. J'ai donné un mandat d'information à mon espion (Caaaaaaaaarl !).

Elle m’a expliqué aussi qu’il y a trois formes de programmation. Hi-Res pairé, Hi-Res séquentiel et Fidelity 120 (120 canaux virtuels). (J’ai un peu oublié les caractéristiques de chaque forme.) Mon appareil peut avoir trois programmes. Aujourd'hui, elle me donne une programmation très basique et très atténuée : elle me met peu des hautes fréquences du langage sinon, dit-elle, je vais sortir de ma peau. Il y a trop longtemps que mon cerveau n’a pas entendu ces fréquences.

Ensuite, on a installé le machin. L’antenne extérieure se met en place par tâtonnement  : on la fait glisser sur le crâne à peu près à l’endroit où on sait qu’elle va et les aimants font le reste, c’est-à-dire que, à l’endroit approprié, ça ne glisse plus, ça reste en place.

Le processeur se met sur l’oreille, exactement comme l’appareil auditif. La différence est qu’il n’y a pas de moule dans l’oreille et donc, pas de cillement.

On commence par brancher mon appareil à son ordinateur. Première opération, son ordinateur demande l’autorisation de relier mon processeur à mon implant. Le processeur devient ainsi individualisé et il est impossible de le relier à une autre antenne, ça ne fonctionne pas. Il y avait eu, paraît-il des cas où des gens s’échangeaient leurs processeurs, ce qui est nuisible. Je ne sais pas pourquoi.

Elle invite Roger à passer de son côté de son bureau, pour qu’il puisse suivre les opérations sur son écran.

Elle me fait voir le petit diagramme qui s’affiche alors, avec des colonnes verticales représentant le signal capté par chaque électrode.

Pour la première opération, elle programme les capteurs pour mon niveau de confort, quatre à la fois. Le système émet des bips et je dois indiquer à quel moment les bips sont trop forts.

On passe à l’étape suivante, la vraie. Elle me prévient d’abord que je ne dois pas me surprendre de ne pas comprendre. La plupart des gens, dit-elle, décrivent les premiers sons comme des clochettes, avant de commencer à percevoir des voix « robotiques ». Il y a un petit moment de confusion parce que, comme elle ne m’avait pas encore dit d’enlever mon appareil auditif de l’oreille droite, je le porte encore. Bon, je l’enlève.

Qu’est-ce que j’entends ? Les mêmes petits bips que tantôt. Elle me parle, je n’entends pas. Au bout d’un moment, je me rends compte que les petits bips suivent le rythme et l’intensité des mouvements de ses lèvres. Au bout d’un autre moment, je me rends compte que je lis vraiment très très bien sur ses lèvres, que je comprends tout ce qu’elle dit. Et voilà que je me rends compte que les bips se sont transformés en mots perceptibles. C’est une voix que j’entends, ce sont des mots que je comprends. Je me rends compte que Roger parle avec elle. Je comprends ce qu’ils se disent. J'explique que les bips se sont transformés en mots : je comprends ! Je crois que les premiers mots de Roger que j’ai compris sont : « tu nous comprends ? »

Il n’y a aucun doute que ce sont, en effet, des voix « robotiques », métalliques un peu, boîte de conserve pas mal.

Carole continue à m’expliquer ce qu’elle fait et, à un moment donné, elle dit : « bon là, j’arrette » avec le è court d’une vraie Québécoise (Dominique, Noëlla : le è court d’une Québécoise de la ville de Québec, c’est une caractéristique de prononciation très locale). Je ne peux réprimer un petit sourire et je dis : « elle a dit j’arrette, je l’ai entendue ». Nous rions, Roger est particulièrement content que j’aie entendu ce è court parce que ce n’est pas une donnée qui se lit sur les lèvres. Je l'ai entendu ! Elle reprend en disant « j’arrête », avec un e exagérément long, puis, avec emphase « JE-M’IN-TER-ROMPS ».

Elle me remet les manuels, le chargeur, nous explique les piles, etc. et voilà, la première session est finie. Je suis envoyée dans la nature. Aujourd’hui, je devrai vivre en essayant les trois formes de programmation, par périodes de deux heures chacune, environ.

Elle me raccompagne. Je lui dis que je dois passer aux toilettes. Elle rit et me dit : « vous allez avoir peur ». Bon, je vous passe les détails, mais je n'ai pas eu peur. Tous les bruits habituels se faisaient surtout entendre sous forme de cillement.

Je devais prendre des notes, les voici.

Programme 1. Du départ de l’hôpital jusqu'à 14 h.

Je différencie la voix de Carole et celle de Roger.
Les sons ont tous un petit double, un couic. C'est extrêmement difficile à décrire. Les voix sont indubitablement robotiques.

Dans l’auto. Le bruit du moteur est d’abord un cillement puis, au bout de quelques minutes, il devient un bourdonnement, plus bas.

Surprise : La voix du GPS est à peu près identique à mon souvenir. Y compris la petite cloche qui précède une instruction. Désolée, Roger, c’est Sebastian que j’entends le mieux !

Dans l’auto, je peux parler avec Roger et le comprendre.

Il met de la musique. C’est bizarre. C’est comme si tout n’était que rythme. J’entends très bien la durée des sons (ta tatata TIIIIII), j’entends qu’il y a des timbres sonores différents, je comprends le sens rythmique des phrases, mais je ne différencie à peu près pas la fréquence. Pour les paroles, meilleure chance la prochaine fois.

Arrivée chez Suzanne et Roger. Je comprends mieux Roger que Suzanne. Quand ils parlent en même temps, ça devient indistinct.

Le bruit de mes pas dans l’escalier a un son de cymbale.

Roger me mène au salon, où il y a un coucou. J’entends ce son, presque pas métallique, sec, sans résonance, régulier, dont le rythme correspond au battement des battants du coucou, ce son qui vient par paire, un, un peu plus clair, l’autre, un peu plus bas. Il me semble que je perçois l'attaque du son (au sens ADSR, étape attaque de l’enveloppe d’un son) qui fait que, pour le décrire, j’utilise sans y penser tic, avec un t. tic tac de l’horloge. Il faut bien remarquer que je n'ai jamais entendu ce tic-tac auparavant.

Taper sur mon ordinateur. Le tap-tap est différent de ce que je sais, plus métallique, plus bruyant.

Programme 2

On en profite pour changer la pile, donc pas évident que les différences sont dues juste au programme.

Les voix sont plus métalliques. Si je ne regarde pas la personne au moment où elle se met à parler, il n’est pas tout de suite évident que c’est une voix, avec du langage.

RogerL dans mon dos, je ne comprends pas.
RogerG et Suzanne dans le salon. J’en perds des bouts. Peut-être aussi la fatigue.

On essaie d’écouter de la musique. Peu concluant. Je distingue le rythme et l’intensité et je différencie un peu les timbres mais la fréquence, c’est affreux. Quoique mieux que dans l’auto. Suzanne chante. Je reconnais quand c’est une chanson que je connais.

Le couic du double son est plus métallique.

Il y a beaucoup de wouououououou (comme dans une salle de concert, au moment où le micro fait wouuuuuu, non, pas le sifflement à très haute fréquence, le wouuuuu) que je ne sais pas reconnaître ni analyser.

Après une heure et demie d’usage de ce programme-là, il me semble que je l’aime moins que l’autre. Mais je sens une fatigue très nette. J’ai l’impression d’être dans une caisse de résonance.

Je vais aller dehors, marcher un moment avec Suzanne.

Ouache, le vent. Je mets mon capuchon. Frottements. Nous ne marchons pas longtemps, d’ailleurs le vent est froid.

Programme 3

Je n’aime pas DU TOUT le programme 3, pour le moment. Les voix sont très métalliques. J’ai beaucoup de difficulté à distinguer quoi que ce soit. Au point que je me suis demandé si je n’avais pas un problème de pile, à nouveau. J’ai enlevé processeur et antenne extérieure et j’ai retiré la pile du processeur parce que, quand on la remet, le processeur indique le stade atteint par la pile. Trois clignotements orange, c’est tout à fait acceptable. ET J’AI MIS L’ANTENNE EN PLACE MOI-MÊME TOUTE SEULE POUR LA PREMIÈRE FOIS. C'est facile, en fait.

Oh, je n’aime pas ce programme. J’y reste quand même pour m’habituer. Les bruits sont beaucoup plus présents et les voix sont affreuses. Quelqu’un commence à me parler et je cherche, en urgence, ce que c’est que ce bruit.

Allons, un effort, quand même.

Horreur ! Que se passe-t-il ? RogerL, dans la cuisine, à 12 pieds de moi, sort du papier d’aluminium de sa boîte.

Dominique, le fils de Suzanne et Roger, est assis face à moi. Il discute avec RogerG. Je ne comprends à peu près rien de ce qu’ils disent.

Je monte chercher quelque chose pour souper et je prends conscience que, en revanche, les bruits sont beaucoup plus réalistes. Le système de ventilation de la salle de bain, le robinet, je les entends comme je m'en souvenais. N'empêche.

Pour souper, j'alterne entre les programmes 1 et 2, finissant par donner la préférence à 2, mais je suis vraiment fatiguée et les sons commencent à me passer tout simplement par-dessus la tête.

De retour à la chambre. Roger fait des essais : il se place derrière moi et me parle. Et je comprends. Il me dit d'abord : « répète ce que je te dis ». Je dis aussitôt, bien sûr : « répète ce que je te dis ». Il s'ensuit un dialogue que je vous épargne, où prennent successivement place les mots dieu, Allah et maître. Tu peux toujours rêver, que je réponds. Mais j'ai compris. Je n'aurais pas compris avant.

Ah oui. De quoi ç'a l'air vous demandez-vous ? Je vous propose donc une comparaison.

Moi, hier, chez Élisabeth, avec Roger. Des clowns dans la folie du Canadien. Photo prise avec Photo Booth.














Moi aujourd'hui, aussi avec Photo Booth. Vous voyez la différence ? Il n'y en a pas. Ou si peu.














Bon, bon, d'accord, j'essaie de vous montrer.










Amusant. Les quelques fois que j'ai mis ou enlevé l'antenne, il y a eu presque chaque fois un moment où elle était libre et donc se dirigeait vers le bas (elle est retenue par un fil épais au processeur, voir la photo, elle ne tombe pas). Et en se dirigeant vers le bas, elle rencontrait mon collier et s'y accrochait fermement. Efficace.

Rome ne s'est pas créée en un jour et j'ai du chemin à faire. Mais je crois vraiment que je vais me rendre.

À demain.

dimanche 13 avril 2008

Jour J2-1

Bon, alors me revoilà. J’écris ceci dans l’auto (eh que c’est fin, un portable). Nous sommes en chemin vers la deuxième étape, à Québec. En route vers ma nouvelle oreille. Ma nouvelle vie ? Demain, premier rendez-vous pour la programmation. Premier essai, je suppose, du système complet.

Je m’attends à ce que l’audiologiste, Carole L., réponde à quelques questions que je lui ai déjà posées (voir ci-dessous) puis me montre le processeur, ses boutons, et le très important On-Off… puis inspecte ma cicatrice et me tripote le crâne à l’endroit de l’implant pour vérifier que je peux accepter l’antenne. Ensuite, je suppose, on s’exerce à placer l’antenne, retenue à la partie aimantée de l’implant. Et puis on enlève la prothèse, on met le processeur à ON et go.

Rien qu’à l’écrire, j’ai le cœur qui bat très fort.

J’ai demandé à Roger de tenir compte du fait que je suis, je l’admets, stupidement sentimentale, pour que ses premiers mots à lui que j’entendrai avec l’implant soient quelque chose comme « bonjour, mon amour » et non pas « JE SUIS DIEU ». En supposant que je les entende, ces premiers mots, ET surtout que je les comprenne, remarquez bien…

Je vous dirai ce qu’il a dit.

Il est plus que probable qu’en fait, les premiers mots entendus viennent de l'audiologiste, quelque chose comme « et puis, madame Dion, m’entendez-vous » ? J'espère vraiment, mais vraiment, que ce ne sera pas : « un, deux, trois, un, deux, trois »

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Qu’est-ce que tu fais, tu n’écris plus, m’avez-vous demandé. Vous avez même manifesté un peu d’inquiétude : que deviens-tu, ça va ? Cette gastro, tu n’as pas pris la C. difficile, toujours ? (non)

Ça allait. Tranquillement. Je dirais que j’ai repris mon rythme à peu près normal d’activité au début d'avril, plus de trois semaines après l’opération. Jusque là, c’était comme le légionnaire feignant, d’Astérix : une demi-dalle et on se repose. Parfois, il suffisait de penser à une demi-dalle pour avoir besoin de se reposer. J’en ai été surprise mais plusieurs m’ont dit que j’avais bien tort de m’en étonner et qu’une anesthésie générale, même pour une opération « facile », il faut du temps pour s’en remettre. Moi qui pensais aller faire le marché la semaine d’après… La gastro n’a pas aidé mais même sans la gastro, ç’aurait été plus long que je ne le pensais.

Des sept livres que j’avais perdues, je n’ai repris que trois. Hé hé.

Mon oreille gauche et sa prothèse me manquent grandement. J’ai la plus grande difficulté à comprendre même « juste » Roger, pauvre homme (« coudon, es-tu sourde, toi ? »). Pourtant, je joue du piano, j’en ai été la première surprise. Pour le iPod, on n’en parle pas, je n’ai même pas essayé.

Lundi dernier, je suis allée marcher 45 minutes, et aussi mercredi et vendredi. Et après cette orgie de demi-dalles, je n’ai pas eu besoin de me reposer.

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La semaine précédente, une rencontre a été organisée au Centre de réadaptation en déficience physique Le Bouclier, à Saint-Jérôme, à une vingtaine de minutes de chez moi. C’est là que se fera ma réadaptation, une fois la programmation terminée, soit du 28 avril à la fin de juin, quatre heures et demie par semaine. J’ai fait connaissance avec les gens qui travailleront avec moi.

Au début, la coordonnatrice des services, qui avait convoqué la réunion, me parlait très fort, en articulant de façon très marquée. Compréhensible, elle a affaire à des gens qui entendent mal et lisent plus ou moins aisément sur les lèvres, et ce depuis des années, voire des décennies.

Mais, je l’avoue,
ça
me
tombait
joyeusement
sur
les
nerfs

Heureusement, elle s'est rapidement aperçue que c'était inutile. J’ai rencontré :

• deux audiologistes, celle qui va être la principale responsable de la réadaptation, et un autre qui va servir de liaison entre l’équipe et les gens du programme à Québec, notamment au cas où il y aurait des points de programmation à modifier, si j’ai bien compris ;
• une éducatrice spécialisée (pour les exercices) ;
• un psychologue ;
• une orthophoniste.

Quand l’orthophoniste s’est présentée, elle a dit : « moi, je vous aide pour le langage, vous réhabituer à parler, acquérir le vocabulaire ». Je lui ai dit : « sans vouloir vous insulter, je pense que nous n'allons pas nous voir très souvent ». Elle a dit « non, en effet », en riant.

On m’a demandé quelles étaient mes attentes. J’ai dit que je voudrais à peu près revenir au niveau d’audition et de discrimination que j’avais il y a cinq ans : pouvoir comprendre des conversations simples et en petit groupe. Et pouvoir faire de la musique, jouer du piano, écouter mon iPod ou un système de son. J’ai mentionné que je savais qu’aller au restaurant ou participer à une réunion en grand groupe ne serait jamais idéal et que cela m'importait peu. J'ai dit que j'aimerais écouter la télévision, mentionné que ce n'était cependant pas une priorité et que, de toute façon, il y a toujours les sous-titres. Roger a ajouté que j’oubliais un objectif important : être capable de parler plus facilement au téléphone.

Personne ne m’a dit que mes objectifs n’étaient pas réalistes. En viendrai-je là vraiment ?

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Pour l’instant, Roger m’a promis que, si le système me faisait dire WOW, il couperait sa barbe islamique. Je l’écris ici !


Questions posées à l’audiologiste. Quels tests me sont interdits ? Je sais déjà que je ne dois plus subir de test d’imagerie par résonance magnétique. Or…

tenez-vous bien…

J’ai appris il y a quelques jours que j’ai une cataracte à l’œil droit. Eh oui ! Aujourd’hui, tout le monde le dit, une cataracte, ce n’est rien. Non seulement ça s’opère facilement, mais ensuite, on voit mieux qu’avant puisque la myopie, règle générale, est corrigée complètement. (J’aimerais bien, oui. Pour la lecture labiale, ne plus être myope, un rêve !) Mais… est-ce que le test de biométrie est un test acceptable pour moi, l’implantée ? Restez à l'écoute. Suite à demain.